Il fait froid. Il pleut. Le coton de mon pull est trempé par la bruine et je me demande si c’était une si bonne idée que ça. J’observe Maddox essayer de garder la tente droite, mais les bourrasques de vents envoie va,ser la toile de cette dernière. Je frotte mes bras, le bout de mes doigts est gelé. Ses « fucking hell » résonnent à mes oreilles et étrangement, ça rend la scène moins désagréable. Je m’agenouille près de lui, tâchant mon pantalon d’herbe mouillée :
“On aurait mieux fait de s’arrêter dans un vieil hôtel plutôt que de vouloir jouer les aventuriers du dimanche, non ?”. Un sourire se poste sur mes lèvres, tandis que je vois toute la frustration sur son visage. Il est adorable, les éléments sont contre nous, mais il s’entête quand même à planter cette satanée tente. J’attrape le tissu pour essayer de stabiliser le truc. Le problème, c’est que je suis une fille de la ville, moi. Je n’ai jamais fait de camping, je n’ai jamais essayé de planter une tente dans les îles Shetlands, encore moins sous la tempête. Mon autre main se pose sur épaule, j’ai les lèvres un peu bleutées à cause du froid, je lui souffle en riant :
“On abandonne ?”.
***
J’aurais dû savoir qu’on n’abandonnait pas si facilement avec un Ecossais. C’est têtu, ces choses-là. Et puis le modèle Maddox a une fierté particulièrement mal placée. La pluie s’est un peu calmée, nous permettant de planter la tente et de pouvoir se mettre à l’abri. Il fait quand même froid sous ce petit truc exigu et je dois bien avouer que je pensais que le temps serait de notre côté pour notre escapade en amoureux. Ce week-end, c’est un peu nos retrouvailles et je flippe un peu que tout ça soit gâché par une toile de tente perméable. Je me redresse :
“Le soleil n’est pas de notre côté, on dirait …”. Il y a un rire dans ma voix. J’avais pensé faire un feu de camp, griller des chamallows et raconter des histoires terrifiantes à Madds, mais nous voilà coincés là dessous, avec une lampe torche qui vacille au moindre coup de vent. Je fouille dans mon sac, pour sortir un jeu de cartes :
“T’as envie de jouer ? On peut faire une bataille !”.
***
J’abats ma dernière carte, dans un théâtral : « ET BAM ». Un large sourire barre mon visage et les éclats de nos voix couvrent le bruit de la pluie qui s’est intensifiée à nouveau. Nous avons réussi à réchauffer l'espace en gigotant un peu.
“Je t’avais dis que j’étais imbattable, n’est-ce pas ?”, je me penche vers lui, mon nez frôlant le sien. Il n’y a pas vraiment eu de “vrais” rapprochements entre nous, depuis qu’on a décidé de se donner une nouvelle chance. Et c’est normal : pas à pas, on a dit. J’ai peur d’aller trop vite et de me précipiter. J’ai pourtant envie de croire qu’on est faits pour être ensemble. Je recule, m’étire :
“J’espère qu’il fera beau demain, qu’on puisse …”. Je n’ai pas le temps de terminer ma phrase, parce qu’un énorme « crac » se fait entendre. Au même instant, une gerbe d’eau glacée se déverse sur nous, la lumière est un peu plus intense : la tente a cédé. Sous le poids de la pluie, la toile a craqué. Je hurle, de surprise et parce que le froid me saisit jusqu’à l’os. Je bondis sur mes jambes, essayant de sauver mes affaires de toute cette eau, tout en disant :
“MAIS POURQUOI TU M’AS PAS DIS QUE C’ÉTAIT UNE IDÉE DE MERDE, LE CAMPING SAUVAGE ?!”.
J’ai beau hurler, je ne peux pas m’empêcher de rire. Je ris si fort. Il fait froid, et on n’a plus de tente pour la nuit. Il n’y a qu’à nous qu’un truc pareil peut arriver.