Non seulement Grace se demandait si c'était une bonne idée d'avoir accepté la journée d'aujourd'hui, mais en plus, elle changeait d'avis toutes les deux secondes. Un coup, elle était persuadée de ne pas mériter la moindre attention de la part de quelqu'un comme Bear, et l'instant d'après, elle se rappelait combien il avait insisté pour partager ça avec elle en lui assurant que ça le rendait heureux. Et elle était heureuse de lui faire partager un peu de bonheur. Mais elle était persuadée qu'elle allait se rendre ridicule et que cela rejaillirait sur lui. D'un autre côté, elle se sentait aussi comme Cendrillon le soir du bal. Tout s'embrouillait dans sa tête et elle était contente qu'il ait prévu de tout organiser pour ce qui était de sa mise en beauté. Elle aurait été incapable de se préparer convenablement au vu de son agitation mentale.

Elle sentit venir le coup de panique au moment où elle entendit sonner à la porte. Elle dut se forcer à respirer profondément pour ne pas entrer directement en coup de panique et aller répondre à la porte. Il allait se moquer d'elle s'il la voyait dans cet état pour rien, elle en était certaine. Les pensées fusèrent dans son esprit. Bien-sûr, ils allaient faire du shopping, alors elles n'avaient pas besoin de s'habiller, le but étant de trouver les habits dehors, mais est-ce qu'elle était suffisamment classe pour lui quand-même. Ou peut-être qu'elle l'était trop justement. Ou alors, peut-être qu'il aurait choisi une autre tenue dans un autre style et que du coup, ils ne seraient pas en harmonie.

Elle se força à respirer profondément et ouvrit la porte pour constater qu'il ne portait qu'un jean et un t-shirt normal et que sa première réaction était de lui donner l'accolade. A partir de là, il fallait bien qu'elle s'efforce d'admettre qu'elle était bien à sa place et que tout se passerait bien. En tout cas, elle avait envie d'y croire pour le moment. Elle tenta même un sourire, mais sans savoir exactement si son sourire ne ressemblait pas à une grimace. Le sourire doux qu'il lui renvoya colora un peu ses joues. Elle avait vraiment l'impression de ne pas réagir de façon normale.

« Ho… euh… bien… je suis un peu nerveuse pour être franche. Tu es vraiment sûre que j'ai ce qu'il faut pour que tout se passe bien. J'ai l'impression que je vais juste me prendre les pieds dans quelque chose et m'étaler sur le sol. »

Mais malgré sa conviction profonde qu'il y avait de fortes chances que quelque chose tourne mal, elle avait décidé de faire l'effort d'aller jusqu'au bout et elle se laissa donc entraîner en direction de la voiture de Bear. Il n'y avait aucun doute, c'était sacrément la classe. Mais c'était aussi sacrément source de nervosité de se retrouver dans une telle situation. Elle ne savait pas trop comment elle allait gérer les choses. Cela lui semblait vraiment perturbant, elle devait bien le reconnaître.

« J'ai l'impression d'être Cendrillon, ce soir. Mais j'espère que tu ne vas pas te retrouver juste avec une chaussure à la fin de la soirée. »

Elle ne pouvait s'empêcher de rougir. Pourquoi il fallait toujours qu'elle rougisse lorsque quelqu'un lui faisait un compliment ? C'était un mystère dans l'esprit de Grace, mais c'était un mystère que celle-ci n'était pas sûre d'avoir envie de résoudre. En fait, elle n'avait définitivement pas envie de penser à sa gêne et au fait qu'il exagérait peut-être en la mettant sur un piédestal. Cela dit, le piédestal restait à hauteur raisonnable et la jeune fille était seulement sommée de profiter sans se prendre la tête. Il fallait reconnaître que ce n'était pas quelque chose d'excessif et que la demande était des plus raisonnables.

Elle ne doutait pas qu'il soit capable de la ramasser à la petite cuillère si jamais elle en avait besoin, que la chute soit physique ou morale. Elle avait vraiment l'impression qu'il tenait à son rôle de chevalier blanc prêt à sauver la jeune femme de toute personne qui oserait lui faire du tort ou prétendre qu'elle n'avait pas sa place auprès de lui. Il y avait une chose qu'il tenait à lui faire admettre, c'était qu'elle avait totalement sa place a ses côtés, et que le fait qu'elle soit une pauvre orpheline qui n'avait jamais eu droit a la moindre considération sur le plan social ne changeait rien à cela.

« S’il y a bien quelqu'un en qui j'ai confiance pour me protéger, c'est toi. Si tu n'avais pas été là, je ne sais même pas si je serais en vie à l'heure actuelle. »

Sans compter le moment de rêve qu’il lui avait fait vivre au château d’Édimbourg. Il n'y avait aucun doute, son rôle de chevalier et de prince charmant, il le tenait jusqu'au bout des ongles. Mais ça ne voulait pas forcément dire que la demoiselle était à l'aise avec la perspective de se retrouver dans un univers qu'elle ne maîtrisait pas et de lui faire honte. Elle savait qu'il ne serait pas content de l'entendre parler comme ça, mais cela restait ce qu'elle éprouvait malheureusement. Toutefois, elle avait l'intention de profiter autant qu'elle le pourrait, simplement parce qu'il était évident pour elle qu'elle le lui devait et qu'il ne serait pas heureux si elle ne le faisait pas.

Elle rigole quand il dit qu'elle n'est pas Cendrillon et qu'elle aura ses deux chaussures à ses pieds à la fin de la soirée, ainsi que la robe. Une femme un peu plus avertie que Grace aurait pu faire un commentaire graveleux face à cette remarque. Mais ce n'est pas du tout le genre de la jeune femme qui n'y pense même pas. Et puis, même si elle y avait pensé, il était probable qu'elle n'aurait pas pris le temps de la faire, alors qu'il se montrait aussi charmant et aussi dénué de toute intention bizarre. En fait, la soirée promettait singulièrement de renforcer le lien qui unissait déjà les deux amis.

« Il n'est pas un peu tôt pour me proposer le deuxième rendez-vous ? » plaisante-t-elle davantage pour se détendre elle-même qu'autre chose. « Quoi que, si je compte bien, officieusement, c'est déjà plus ou moins le deuxième rendez-vous. »

On ne pouvait pas vraiment dire que la balade au château d’Édimbourg était un rendez-vous, puisque c'était quelque chose qui avait été fait sur l'impulsion du moment. Mais c'était leur premier tête-à-tête et c'était ce qui avait amené à ce soir-là. Grace n'avait aucune idée de ce qui en résulterait, mais elle était certaine que cela ne changerait rien en ce qui concernait l'affection qu'il y avait entre eux deux. Après tout, elle savait déjà à quel point ils étaient capables de bien s'entendre. Il la faisait rire, il était gentil avec elle, il avait tout ce qu'il fallait pour être un ami digne de ce nom.

Mais quand même, elle avait un peu la tête qui tournait dans la boutique où il y avait de nombreuses robes et chaussures luxueuses. Elle se sentait un peu dépassée en se rendant compte que tout cela n'avait rien à voir avec ce qu'elle avait l'habitude de porter. Elle avait vraiment l'impression d'être Cendrillon, sauf que sa marraine était noire et beaucoup plus imposant qu'on l'imaginerait d'une fée. Cette pensée la fit rire et cela eut le mérite de la détendre un peu. Après un instant de rire, elle questionna l'expert du jour.

« Comment puis-je savoir ce qui me va ? Je n'ai jamais vraiment chercher des tenues spécifiques pour mon profil, mais je suppose qu'il y a un mode d'emploi. »

Grace avait conscience qu'il ne voulait pas qu'elle considère avoir la moindre dette envers lui. Elle savait que ce n'était pas une question qu'il n'assumait pas ses actes, mais il considérait que ce n'était pas comme ça que les choses devaient se passer. Il aurait été dans sa nature profonde de se mettre à ses pieds, simplement parce qu'il ne l'avait pas traitée comme une moins que rien, mais cela faisait maintenant un moment qu’elle travaillait là-dessus et elle savait désormais que ce n'était pas ainsi que l'on devait se comporter, que ce n'était pas ainsi que l'on devait traiter quelqu'un qui se présentait comme votre ami.

« Je sais bien que je ne te dois rien. Je ne le considère pas comme ça. Je trouve juste que j'ai eu de la chance que nos chemins se croisent à un moment où j'en ai eu besoin. Juste de la chance. Tu ne trouves tu pas que notre rencontre est une chance ? »

Il y avait une différence entre la sensation d'être chanceuse et celle qui consistait à se mettre à la merci de quelqu'un qui vous avait rendu service. Pour Grace, c'était quelque chose de totalement différent. Elle espérait qu'il le comprendrait parce qu'elle avait vraiment envie qu'ils restent amis. Pas parce qu'il avait de l'argent ou parce qu'il pouvait faire quoi que ce soit pour elle, mais parce qu'il avait été bon pour elle, ce qui démontrait qu'il était une bonne personne, et qu'elle estimait que les bonnes personnes méritaient son amitié. C'était aussi simple que ça.

Elle pouffa de rire quand il mentionna qu'il pouvait penser dans le désordre à n'importe lequel de leurs futurs rendez-vous, puisqu'il ne s'était rien passé. De toute façon, on ne pouvait pas vraiment parler de rendez-vous en matière d'amitié, ce n'était pas un domaine dans lequel cela s'avérait pertinent. Mais elle avait eu envie de le taquiner un petit peu. Cela prouvait au moins qu'elle se détendait un minimum en sa compagnie et c'était plutôt bon signe. Après tout, c'était la meilleure façon de vivre sa vie. C'était en partie grâce à lui et en partie grâce à Naoko qu'elle avait compris ça.

« En même temps, entre amis, ce ne sont pas vraiment des rendez-vous. Mais je te donne déjà rendez-vous à la prochaine fois de ton choix. »

Elle lui fit une petite révérence afin de valider la proposition, avant de rire. Très peu de personnes pouvaient se vanter de l'avoir entendu rire aussi souvent que lui le faisait. Elle ne savait pas s'il s'en rendait compte, mais il lui donnait une façon d'agir à son contact très différente et beaucoup plus naturelle que ce qu'elle était habituellement. Elle fut un peu fascinée de le voir s'avancer vers une personne pour lui demander son aide aussi naturellement que s'il avait fait ça toute sa vie, ce qui était probablement le cas. Grace sentit sa tête tourner devant toutes ces belles tenues, mais elle se laissa faire devant la compétence naturelle de la vendeuse. Quand elle lui dit que ce serait son petit-ami qui s'occuperait de lui attacher les robes, elle rougit fortement.

« Ce n'est pas mon… », tenta-t-elle, mais il était trop tard.

La vendeuse était partie et Bear l'avait rejointe. Elle ne savait pas s'il était tout à fait convenable de faire ces essayages devant lui. Mais elle n'avait plus le choix, elle avait été mise devant le fait accompli. Lui, il semblait trouver tout cela très naturel, et il lui demanda si elle était prête à essayer ces tenues. Elle décida donc que sa gêne n'avait pas la place dans la situation et elle prit la première robe avant de se glisser dans la cabine. Mais évidemment, elle ne fut pas capable de la refermer et sortit, rouge pivoine.

« Je suis désolée… je sais pas comment ça se ferme… et j'ai essayé de lui dire que tu étais pas… enfin… tu peux la rappeler si ça te met mal à l'aise… faut pas te sentir obligé de m'aider… »

Il n'a pas tort. Des rendez-vous, il pouvait y en avoir de toutes sortes. Elle voulait principalement dire qu'il n'avait pas à se prendre la tête sur les détails de ce qui constituait leur premier rendez-vous et quelque part, il disait la même chose, ce qui lui faisait dire qu'il était inutile de jouer avec les mots. Ils étaient d'accord. Il avait tellement réussi à la tranquilliser qu’elle avait même envie de faire une petite plaisanterie, ce qui ne lui ressemblait pas trop de manière générale. La raison pour laquelle elle était capable de le faire avec lui était encore mystérieuse à ses yeux, mais elle n'avait pas envie de s’en soucier ou de se poser des questions. Elle préférait profiter de l'instant tant que c'était encore possible.

« Ah non alors ! Je ne suis pas d'accord. Parce que, vois-tu, je ne bois jamais de café. Sauf que moi, j'ai envie de te revoir. Alors si ça ne te gêne pas, on va étaler ça à n'importe quelle boisson chaude. Ou froide d'ailleurs. Je pourrais avoir envie d'un soda. Mais je crois que je vais surtout avoir envie de te voir toi. »

Elle ne savait pas comment elle avait pu reconnaître ce genre de choses mais c'était la vérité. Elle sentait qu'elle allait avoir envie de le revoir et qu'elle n'attendrait pas qu'il vienne la chercher pour le faire. C’était assez nouveau dans sa façon d'appréhender les choses et elle ne savait même pas ce qui la poussait à être aussi entreprenante, mais ce n'était pas une sensation désagréable. Il était temps qu’elle accepte de ne plus être juste une jeune femme timide mais d'être quelqu'un avec qui il fallait compter. Elle était quand-même la cavalière d’un homme gentil avec qui elle s'entendait bien. Si elle était là aujourd'hui, c'était bien qu'elle ne devait pas se mésestimer.

Elle se sentit quand-même un peu mal à l'aise lorsque la vendeuse partit du principe qu'ils étaient ensemble alors que ce n'était pas le cas. Elle s'excusa auprès de lui, parce qu'elle n'avait vraiment pas l'intention de le mettre devant le fait accompli et de lui occasionner la moindre gêne. Elle ouvrit cependant des yeux ronds alors qu'il affirmait quelque chose qui lui faisait penser qu'il était en train de se dire qu'elle l'avait cru mal intentionné. Ce n'était pas du tout le cas. C'était davantage pour lui que pour elle qu'elle s'était excusée au préalable. La simple idée qu'il croit qu'elle pense du mal de lui la rendit extrêmement triste et elle s'empressa de corriger le tir.

« Ho, mais jamais je n'ai pensé ça de toi ! Non, je ne voulais juste pas que tu sois mal à l'aise. Mais ta présence… enfin… tu ne me gênes pas. Et moi, ça me fait plaisir de t'avoir auprès de moi. Je ne veux pas que tu te sentes forcée à quoi que ce soit, c'est tout. Tu n'as pas à me dire que tu es un homme honnête, je n'en ai jamais douté. »

Les choses mises en point, elle regarda la robe et très honnêtement, elle se dit qu'elle n'avait jamais rien vu de pareil. Il affirmait qu'il y avait d'autres robes si celle-ci ne lui plaisait pas, mais aucune robe ne pourrait lui déplaire. Tout serait beaucoup plus beau que ce qu'elle avait toujours porté. Considérant cela, elle comprit qu'elle ne pourrait jamais choisir toute seule. Elle allait avoir besoin de conseils pour savoir ce qui lui allait vraiment et ce qu'elle trouvait jolie juste parce que c'était clinquant. Elle devait admettre qu'elle n'avait pas beaucoup de référence de ce côté-là. Elle n'avait pas beaucoup de référence à ce sujet de manière générale.

« Je dois admettre que cette robe me va à la perfection, mais il y a un souci. Vois-tu, je n'ai jamais eu de robe aussi jolie que ça et je suis incapable d'en trouver une seule qui ne me plaira pas. Est-ce que tu aurais des conseils ? Des idées sur ce qui pourrait m’aller mieux. Je suis une page blanche, il va falloir écrire mon style. »

Elle tourna sur elle-même en riant. Il était temps de se détendre et de s'imprégner du personnage. Désormais, elle voulait absolument montrer le visage de quelqu'un qui était d'accord avec ce qui était en train de se passer. Elle avait mis trop de temps à atteindre cette situation, dans son esprit.

Grace ne voyait pas pourquoi elle n'aurait plus envie de le voir après le bal. Il était tout à fait possible que lui finisse par regretter d'avoir embarqué une fille gauche et empotée avec lui. Mais pour elle, elle était la fille ordinaire que l'on change en princesse d'un geste. Et elle avait trouvé un prince particulièrement doux et gentil qui ne pourrait jamais lui faire de mal. Elle pensait franchement que s'il y en avait un des deux qui devait changer d'avis sur la situation après cette journée, ce serait plutôt lui. S'il pensait le contraire, c’était probablement la promesse d'une longue une précieuse amitié puisqu'aucun ne voudrais aller repousser l'autre.

« Pourtant, j'ai un petit producteur pas loin de chez moi qui produit de très bons jus de fruit. Tu devrais essayer. »

Elle l'avait découvert par hasard et avait continué de se fournir chez lui parce qu'il mélangeait de délicieux produits avec un prix extrêmement raisonnable, un bon moyen de consommer des boissons un peu originales sans y mettre un prix exorbitant, c'était le genre de compromis qui lui permettait d'avoir un appartement avec sa meilleure amie et de pouvoir subvenir à ses propres besoins malgré son salaire quelque peu léger. Même si l'ambiance s'était un peu allégée, elle ne pouvait pas empêcher ses anciens travers de reprendre le dessus par moment et notamment sur la considération que l'on avait envers elle par rapport a son ami.

Mais même si elle était un peu mal à l'aise avec les présuppositions de la vendeuse à cause de ce qu'il pouvait penser, elle fut très honnêtement touchée par la manière dont il lui exprima les choses. Elle avait déjà compris qu'il s'adaptait beaucoup à elle et elle se rendait compte que c'était de plus en plus le cas, alors qu'elle ne lui avait rien demandé. Et les plus jolis cadeaux étaient toujours ceux que l'on vous faisait sans que vous le réclamiez. Il était impossible de justifier un sentiment de culpabilité à propos de quelque chose que vous n'aviez pas dit vouloir, quand bien même vous le désiriez de tout votre cœur.

« Je te remercie. Je n'ai pas l'habitude de ce genre de situation et je n'ai connu que des personnes qui m'en auraient voulu d'être prise pour mon fiancé. J'ai tendance à penser que c'est une mauvaise chose, sans même penser à consulter la personne auparavant. Je te demande pardon. »

De son côté, elle ne pensait pas que quelqu'un comme lui soit un mauvais choix sur le plan sentimental. Il n'était peut-être pas le plus bel éphèbe que l'on puisse trouver, mais il avait du charme et des qualités humaines qui surpassaient absolument tout. Grace préférait quelqu'un de gentil, plutôt que quelqu'un d'orgueilleux et de narcissique comme il y en avait énormément dans ce genre de milieu. La façon dont il était prêt à l'aider à trouver la robe idéale lui mettait sur les lettres un sourire qui en avait trop souvent été absent.

Elle se demanda s'il voulait qu'elle les essaye toutes réellement parce qu'il fallait absolument qu'elle entre toutes ou pour le simple plaisir de la voir dans des tenues diverses et variées et particulièrement belles. Mais avant qu'elle ne puisse faire quoi que ce soit, elle le regarda passer un coup de fil avec l'assurance d'un homme averti. Elle en fut assez impressionnée avant qu'il ne la sorte de ses pensées en lui donnant le thème de la soirée. Elle réfléchit un instant, considérant que si le choix lui appartenait, elle devait faire l'effort d'en faire un.

« Je verrai bien une robe bleu clair avec des éléments blancs pour rappeler la neige et les flocons, quelque chose qui a l'air de tourbillonner comme une pluie de flocons tombant du ciel. Tu vois ce que je veux dire ? »

La gentillesse et la bienveillance de cet homme, peu en avait de communes. Grace savait bien que ce n'était pas parce que cet homme semblait considérer comme une bonne chose de l'avoir dans sa vie que c'était le cas de tout le monde. Mais il suffisait qu'il y en ait un pour que cela lui fasse du bien et lui fasse comprendre quelle était pas obligée de considérer comme acquis le fait d'être étiquetée quantité négligeable. Elle allait devoir s'y faire, c'était une personne de plus qui la considérait véritablement comme quelqu'un ayant de la valeur. Il lui fallait donc admettre qu'elle en avait.

« Très sincèrement, je pense que la jeune femme qui sera aimée de toi aura beaucoup de chance. Je suis moi-même heureuse d'être ta cavalière aujourd'hui. Ça me fait plaisir que ce soit réciproque. Je crois que nous allons bien nous amuser. »

C'était la première fois depuis le début de leur échange quelle mentionnait l'idée de bien s'amuser, preuve qu'elle commençait un peu à se détendre. Elle avait compris que ce n'était pas juste un privilège que Bear lui accordait, mais qu'il était sincèrement heureux de partager ce moment avec elle et puisqu'elle était heureuse aussi, elle décida de ne plus s'en cacher. il ne servait à rien de se montrer trop modeste. Elle avait clairement été choisie par cet homme parce qu'il appréciait sa compagnie et elle devait considérer comme un fait établi qu'il ne l'aurait pas fait si elle n'en valait pas le coup.

« Tu as l'air habitué des salons d'essayage. Pourtant, cela m'étonnerait que tu portes souvent des robes, même si je suis sûre que tu serais très mignon avec », plaisanta-t-elle.

Elle était persuadée que cela ferait du bien à son cavalier de la voir le taquiner. Cela lui ferait tout simplement du bien de se rendre compte qu'elle était capable de se détendre et de le traiter différemment qu’avec la déférence qui lui était, malgré tout, naturelle. Le choix des robes était parfait et elle allait y avoir du mal à se décider entre les trois options. Mais elle décida que rien ne pressait et qu'elle avait le temps de les essayer afin de voir l'effet sur elle-même. Afin de ménager sa modestie, elle commença par la plus simple des trois. Elle l’enfila et tournoya sur elle-même comme une princesse en riant.

« Qu'en penses-tu ? Est-ce que je suis élégante ? »

Elle en fit de même avec la deuxième puis avec la troisième, de plus en plus à l'aise avec le concept. C'était finalement plus simple que la vendeuse soit partie. Il était évident que son cavalier avait davantage de facilité pour la mettre à son aise. Toutes les robes lui plaisaient, mais elle avait quand-même une préférence. Cela dit, elle n'était pas certaine que son choix serait à la hauteur du niveau de la soirée et elle préférait demander son avis à son partenaire. Elle voulait qu'il soit fier de l'avoir à son bras. Et puis, elle aimait bien le fait de se dire qu'ils faisaient ça à deux et qu’il ne l'accompagnait pas seulement.

« Est-ce que tu penses que n'importe laquelle pourrait convenir ? Ou il y en a une qui fonctionnerait mieux ? »