C’est habillé d’un costume sur-mesure plutôt passe partout que tu pénétras les lieux que l’hôpital avait loué afin de fêter la fin des travaux d’extension de l’aile chirurgicale dans laquelle tu officiais. Quelques chambres avaient été ajoutées, ainsi qu’une salle d’opération flambant neuve qui, il fallait bien l’avouer, te faisait un peu de l'œil.
A cette occasion, avait été convié tous les employés le souhaitant, ainsi que ceux du cabinet d’étude grâce à qui le projet avait pu se concrétiser à moindre coût.
Bien évidemment, tu comptais bien profiter de cette occasion pour élargir ton réseau de connaissances et te faire mousser. Si tu n’étais ici qu’un simple chirurgien -et encore, pas tout à fait-, tu n’en restais pas moins un Von Kuffner. A toi de jouer intelligemment pour faire ressortir ton nom avant ta fonction, face aux grands ponts que tu croiserais sûrement au détour d’un verre de champagne bon marché ou de quelques toastes.
Pour autant, tu avais décidé de jouer la carte de la sobriété dans ton trois pièces sans doute plus cher que le traiteur choisi par l’hôpital à l’occasion de cette soirée. Un pantalon noir antracite, une chemise blanche ajustée et un gilet de la même couleur que le pantalons.
Comme bien souvent, tes vêtements brillaient par leur simplicité. L’élégance, la vraie, ne devait en aucun cas être criarde.
Les vêtements devaient te sublimer autant que tu les sublimais toi
Arrivé sur le lieu de la soirée, tu saluas tes collègues ainsi que ceux que tu supposas être du bureau d’études, ne les ayant encore jamais vus à l’hôpital.
Si tu avais pris la peine de connaître les noms de chacun des grands noms invités ce soir, tu n’en avais pas fait de même avec les sous-fifres à qui tu offrais de polies poignées de mains et sourire avant de chercher plus intéressant du regard.
Un chef ou une jolie fille, au choix. Tout sauf ces photocopies d'employés de bureau insipide avec leurs costumes wish qui devaient leur filer des boutons.
Au final, la soirée se déroula à peu près comme tu l’avais prévu. La plupart des convives s’étaient jetés sur le champagne et nombre de tes collègues semblaient un peu pompette.
Dans d’autres circonstances, sans doute que tu aurais profité d’une accalmie pour inviter l’une ou l’autre collègue à faire un tour afin de trouver un endroit un peu plus discret pour jouer au docteur en dehors de vos heures de travail, mais pas ce soir. Ce soir, tu n’étais pas là pour ça, mais bien pour prospecter de potentiels futurs noms à ajouter dans le carnet d’adresse de ta famille.
Ce que tu parviens à faire, moyennement satisfait cependant. Ces hommes étaient bien moins intéressants qu'escompté et tu dû user de ton meilleur masque pour ne pas leur laisser paraître l’ennuie que leur bêtise éveillait en toi.
Dire que la soirée n’en était qu’à son milieu…
Finalement, cette soirée était encore plus chiante que celles mondaines auxquelles tes parents te forcaient à participer.
Au moins, là-bas, tout le monde était à peu près sur un pied d’égalité et jouaient au même jeu. Ici, tu ne savais trop sur quel pied danser. Simuler la plèbe ou jouer la carte de la mondanité ?
Finalement, tu choisis de prendre une pause dans tes prospections en remarquant l’un de tes collègues s’éclipser discrètement avec un autre homme dans une pièce un peu plus à l’écart.
Piqué par la curiosité, tu terminas ta seconde coupe de champagne de la soirée avant de les rejoindre, présentant à raison ce qu’il était en train de se tramer.
Tu savais que ton collègue sniffait. Cela faisait partie de ces secrets de polichinelle que tout le monde savait, mais faisant semblant d’ignorer par convenance.
Mais ce soir, l’idée de sortir de ton ennui avec quelques lignes de poudre blanche était plus forte que l'apparence et, suivant les deux hommes dans une pièce servant sans doute de débarras, à côté des toilettes, tu levas les mains en l’air, un sourire innocent aux coins des lèvres.
Tu expliquas aux deux hommes que tu étais là pour la même raison qu’eux -à savoir surmonter l’ennui- et que, s’ils avaient de quoi, tu n’avais rien contre l’idée de rendre cette soirée quelque peu plus intéressante. Moyennement paiement, évidemment. Tu n’étais pas un gratteur.
Il ne te fallut guère plus d’une minute ou deux pour les convaincre et à peine plus avant de te retrouver à sniffer un rail de coke sans doute coupé à tu ne savais quelle merde sur le coin d’un lavabo servant sans doute à nettoyer les serpillères.
La grande classe, en sommes.
A peine eu tu relever ton regard de ton rail que tu croisas le regard d’une jeune-femme qui ne t’étais pas complètement inconnu.
Tu mis néanmoins plusieurs secondes à la remettre.
Et merde….
@Mia Diaz